La musique pop et rock à Taiwan

Basé sur des articles de Pat GAO et Oscar Chung

Si d'aventure vous vous rendez à Taiwan, ce que vous entendrez le plus souvent, ce sont des mélodies sirupeuses, savant mélange de musique moderne (mais pas avant-gardiste) et de mots d'amour. En fait, à Formose, la chanson romantique est le fond de commerce de la musique pop taïwanaise. Pourtant il n'y a pas que ce style de musique. Il y a beaucoup plus, pour votre grand plaisir... et le mien.

 

Pop, rock : mandarin, taïwanais ou langues aborigènes

Dans les années 60 il n'y avait à Taiwan que peu d'auteurs et de compositeurs de musique pop, le résultat étant que la plupart des chansons se ressemblaient, elles étaient toutes calquées sur le même modèle. Les seules chansons qui sortaient de cet anonymat étaient des mélodies empruntées au Japon ou à l'Occident (ce qui est parfois encore le cas aujourd'hui). C'est en 1975 que le public commence à se désintéresser de ce style de chansons. C'est cette année-là que le chanteur folk, Yang Hsuan sort son premier album. Sa musique est tout de suite cataloguée "chanson de campus". A l'époque où les États- Unis et l'Europe sont en pleine période Rock et disco, à Taiwan c'est la musique Folk qui connaît un énorme succès. Il faut signaler que le milieu étudiant joue néanmoins un grand rôle car ce sont ces étudiants qui font de la musique et écrivent leurs propres textes, ce sont les futurs artistes qui font leurs armes sur les campus. Cette musique folk restera très populaire jusqu'en 1981.

En 1977 est créé le Golden Melody Awards. C'est un concours annuel destiné à repérer les talents de demain.

En 1987, la loi martiale est levée et les choses changent. Avant, les télévisions insulaires diffusaient des programmes uniquement en chinois mandarin. Avec la démocratisation, les chansons diffusées en taïwanais, en Hakka (mais ce dialecte à moins de succès que les autres) ou en langage aborigène, font leur apparition dans les médias.

En 1989 la première compilation en taïwanais est éditée : "Chants de la folie".

Après le succès de "Return to innocence" tiré de l'album du groupe allemand Enigma, "Cross of changes" sert de thème pour les J.O. d'Atlanta (reprise des chants a capella de Difang Duana ou Kuo Yingnan), plus personne aujourd'hui n'ignore la musique aborigène de Taiwan. Après avoir été dédaigné, ce genre musical est désormais produit par de nombreuses sociétés locales. Cela a préparé le terrain à la star aborigène actuelle de la pop : Ah Mei (ou Zhang Huimei).

La musique en langue taïwanaise est également très présente :Wu Bai, Lim Giong, Chen Sheng et quelques autres en sont les représentants. Les chansons en taïwanais se déclinent désormais dans tous les styles : Pop, rock, blues, rap, reggae… On estime à environ 80 millions le nombre de personnes qui n'ont aucun problème à comprendre ces chansons car parlant un dialecte similaire ou approchant (à Taiwan, dans la province du Fujian et dans le sud est asiatiques).

Aujourd'hui, au total, les chansons en taïwanais, hakka et langues aborigènes représentent 40% du marché taïwanais.

 

Le groupe ChtoniC

 

Le rock alternatif taïwanais :

Le rock alternatif est présent à Formose, et bien présent. Des groupes arpentent pendant des années les estrades des pubs de la capitale et les festivals de musique. Le public y découvre ainsi de nouveaux talents. C'est de cette manière que s'est fait la popularité du groupe Wu Bai & China Blue véritable star de l'underground, passé ainsi de l'ombre à la lumière via un premier album paru sous le label Crystal Records.

En dehors de Wu Bai, déjà connu depuis plusieurs années, il existe plusieurs groupes alternatifs qui commencent à avoir du succès auprès du grand public. LTK Commune dont la plupart des chansons sont écrites en taïwanais s'auto proclame "fer de lance de la violence" à Taiwan. Chtonic, qui a été créé en 1996, possède un style heavy metal avec des textes tirés de la mythologie aborigène. Ladybug est un groupe féminin qui a même fait une tournées dans des bars sur les deux côtes américaines.

Enfin on peut également signaler le cas de Zhang Zhenyue qui a su imposer son propre style, définitivement moderne et désormais reconnu par le grand public. Ainsi que les nouveaux groupes qui émergent comme "Sticky Rice" (Nuo mi tuan), Jiazi ou encore Mc Hot Dog (Le rappeur taiwanais!!!).

En ce début de 21ème siècle, l'île de Formose est un terrain propice pour la musique alternative. Pourtant c'est une longue tradition qui remonte aux années 50. Taiwan est alors une arrière base de l'armée américaine. Dans les bars de la "Combat Zone" (une portion de Chungshan North Road à Taipei) les musiciens jouent alors pour les expatriés et sont source d'inspiration pour les générations futures. Même si les graines de la rébellion on été semées des années 50 aux années 70, ce n'est qu'après 1987 (levée de la loi martiale) que les musiciens peuvent véritablement s'exprimer. Le gouvernement appelle alors à la taiwanisation dans tous les domaines et la population peut véritablement faire l'expérience de la liberté.

Par ailleurs, en 1995 est créé Spring Scream (par des expatriés occidentaux), festival de rock qui a lieu tous les ans sur quatre jours, sur la plage de Kenting (ambiance woodstock, enfin j'imagine), au sud de l'île. Ce festival a permis de donner un coup de pouce aux groupes alternatifs locaux.

Mais le phénomène alternatif est surtout centré sur Taipei, la capitale. C'est là en général que naissent les nouvelles tendances, et dans 4 ou 5 bars en particulier (dont le Zeitgeist, que vous trouvez à Taipei au 122 Zhongxiao Est Road, Section 2). Tout cela fait que le rock alternatif fait partie intégrante du paysage musical taiwanais, auquel il apporte créativité ou tout au moins un son différent.

©Stéphane Ferrero